Taïwan est devenu le plus grand importateur mondial de naphta russe. Les produits pétroliers qui en sont issus sont ensuite vendus à l'Occident
Par rapport aux enjeux du développement de l'intelligence artificielle, les principes politiques comptent moins que les intérêts économique

Sources: The Insider, The Guardian
Taïwan est devenu le leader mondial des achats de naphta russe, un mélange d’hydrocarbures produit par la distillation du pétrole et utilisé en particulier dans l’industrie des semiconducteurs. Les produits issus du raffinage du pétrole russe (orthoxylène, paraxylène, aniline et autres produits chimiques) sont ensuite vendus, entre autres, à des pays d'Europe occidentale qui soutiennent pourtant les sanctions contre l'industrie extractive russe.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : depuis2022, Taiwan a importé 6,8 millions de tonnes de naphta, d’une valeur de 4,9 milliards de dollars, et représentant 20 % des exportations russes de ce produit. L’ampleur de ces importations va en augmentant. Dans le seul premier semestre de 2025 elles se sont élevées à 1,3 milliards de dollars, soit six fois la valeur de celles de 2022. Le principal importateur est une compagnie privée, la Formosa Petrochemical Corporation (FPCC), dont la dépendance du naphta russe est passée de 9 % avant 2022 à 90 % aujourd’hui . Le plus grand vendeur de naphta russe à tTaiwan est la société Novatek, soumise à des sanctions américaines. Le transport est assuré par voie maritime, en particulier par des navires de la société Arab Maritime Petroleum Transport qui sont le plus souvent sous pavillon panaméen.
Dès 2022, le gouvernement de Taiwan s’était cependant joint aux sanctions globales contre la Russie et il avait même adopté par la suite un renforcement des sanctions en les appliquant à de nouveaux produits. Le pays a également adopté diverses mesures de soutien à l’Ukraine, notamment un accord d’assistance aux enfants ukrainiens victimes de l’invasion russe. De fa!on plus générale, l’agression russe contre la lointaine Ukraine a immédiatement focalisé l’attention des médias, mobilisé une partie de l’opinion publique et suscité des prises de position très fermes des autorités politiques. L’affirmation « Aujourd’hui l’Ukraine, demain Taïwan »est devenue un véritable leitmotiv, associant le sort de l’Ukraine à la menace jugée croissante de la République populaire de Chine sur l’autonomie de l’île(même si du point de vue du droit international les situations des deux pays ne sont pas comparables). L’ancienne présidente indépendantiste Tsai Ing-wen avait ainsi déclaré : « L’engagement du peuple ukrainien à protéger sa liberté et sa démocratie, son dévouement intrépide à la défense de son pays, suscitent une profonde empathie de la part du peuple taïwanais, car nous nous trouvons, nous aussi, sur les lignes de front de la bataille pour la démocratie ». La contradiction avec ce qui précède saute aux yeux.
Il serait cependant simpliste de se limiter à relever un « double jeu » ou une « duplicité » des autorités taiwanaises. Dans l’économie mondialisée, Taiwan occupe une position stratégique absolument vitale : on y fabrique deux tiers des semi-conducteurs et 95% des puces électroniques de dernières générations nécessaires au développement de l’intelligence artificielle.
Par rapport à un tel enjeu, les principes politiques comptent moins que les intérêts économiques. Si Donald Trump a adopté des sanctions commerciales contre l’Inde en représailles aux achats indiens de pétrole russe, il n’en va pas de même avec Taiwan. Il a certes bloqué à la mi-seprembre une aide militaire de 400 millions de dollars mais cela relevait d’un élément de marchandage dans les négociations d’un deal avec Pékin, sans lien au respect des sanctions contre la Russie.
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