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Les syndicats britanniques soutiennent l'Ukraine

L'expérience britannique montre qu'une prise de conscience internationaliste est possible et peut déboucher sur des résultats concrets

Le 22 février 2025, plusieurs milliers de personnes ont manifesté à Londres contre l'alliance anti-ukrainienne de Trump et Poutine. L'essentiel de la mobilisation a été réalisé par des syndicats.
Aug 19, 2025

Source: article de Sacha Ismael paru en anglais dans The Chartist

18 août 2025

Traduction en français par le RESU-Belgique

Dès le début de l'invasion massive russe en Ukraine, les mobilisations de solidarité ont été marquées par une très forte présence syndicale. L'Ukraine Solidarity Campaign regroupe à la fois des membres individuels et des organisations affiliées qui peuvent être des fédérations syndicales ou des syndicats locaux. Cette solidarité syndicale s'est traduite par une aide importante aux syndicats ukrainiens dans leur double combat contre l'agression russe et pour la défense des droits sociaux et syndicats en Ukraine. Entre 2022 et 2025, de nombreux débats ont permis d'étendre le soutien à un certain nombre de syndicats qui s'étaient alignés sur une ligne campiste ou pacifiste. Nous reproduisons cette article de Sacha Ismael qui décrit ce processus. Alors qu'en Belgique, la solidarité syndicale avec l'Ukraine reste à un niveau assez faible, l'expérience britannique montre qu'une prise de conscience internationaliste est possible et peut déboucher sur des résultats concrets

Depuis que la Russie a envahi l'Ukraine, de plus en plus de syndicats britanniques ont adopté des politiques de solidarité avec l'Ukraine. Cette année aussi, on a vu un changement dans ce sens.

En 2023, après qu'une série de syndicats aient pris position en faveur de l'Ukraine, le congrès du TUC a voté à une écrasante majorité en faveur d'une motion de solidarité. En 2024, les grands changements ont eu lieu au sein du syndicat de l'enseignement post-16 UCU et du géant des services publics UNISON (1). À la suite d'une campagne menée par ses membres, le congrès de l'UCU a effectivement renversé la position de type « Stop the War Coalition (2)» qu'il avait adoptée en 2023, a soutenu la résistance ukrainienne et s'est affilié à la Ukraine Solidarity Campaign (USC) ; et la conférence nationale des délégués d'UNISON, qui a enfin discuté de l'Ukraine pour la première fois, a facilement adopté une motion de solidarité et s'est affiliée.

Congrès syndicaux de 2025

Cette année, les tentatives visant à détourner les syndicats d'une position pro-ukrainienne ont heureusement échoué, tandis qu'un grand progrès a été réalisé en matière de solidarité :

• Le gain a été réalisé au sein du syndicat des travailleurs de l'éducation NEU, qui compte un demi-million de membres. Après avoir été empêchés pendant trois ans de voter sur des motions de solidarité par des moyens antidémocratiques et avoir été limités à rejeter les motions de Stop the War, les délégués à la conférence ont enfin eu la possibilité de voter en faveur d'une position pro-ukrainienne, grâce aux efforts de campagne du NEU Ukraine Solidarity Network. Au final, le résultat n'a pas été serré : le vote enregistré contre l'un des deux amendements destructeurs de type STW a été de 63 % contre 37 %, tandis que le vote final en faveur de la motion non amendée a été plus important.

• Le syndicat de la fonction publique PCS (3) a été le premier syndicat à s'affilier à l'USC après l'invasion à grande échelle, votant massivement en faveur du soutien à l'Ukraine en 2022 et 2023, et le syndicat a organisé une vaste solidarité concrète. Cette année, une motion visant à renverser cette position, rejetant la lutte de l'Ukraine comme une guerre par procuration de l'Occident et engageant le PCS à faire campagne pour la fin de l'aide militaire, a été soumise à sa conférence annuelle des délégués.

Au final, avec des débats sur l'industrie, de vives polémiques autour des droits des trans et de la Palestine dominant l'ordre du jour, l'Ukraine n'a pas été abordée. À l'approche de la conférence et pendant celle-ci, la dynamique semblait vraiment de notre côté. Quoi qu'il en soit, la position pro-ukrainienne du PCS reste inchangée, même si certains éléments de la direction du syndicat y sont hostiles et qu'il faudra peut-être se battre pour la maintenir.

• Rien à l'ordre du jour du congrès de l'UCU (4) pour renverser la position adoptée l'année dernière. Il y avait cependant deux motions intitulées « Welfare not warfare » (Le bien-être plutôt que la guerre) : la première concernait en fait la militarisation au Royaume-Uni et ne mentionnait pas l'Ukraine, mais la seconde utilisait la position de Keir Starmer sur les troupes britanniques de maintien de la paix pour rejeter une position pro-ukrainienne. L'USC et les membres de l'UCU pour l'Ukraine ont plaidé pour s'opposer à la seconde motion. Les délégués ont voté en faveur de la première et ont renvoyé la seconde à leur direction nationale.

Le NEU et l'UCU ont affiché une tendance similaire, les délégués votant massivement contre le militarisme occidental, mais rejetant les tentatives de Stop the War de lier cela à l'opposition à la lutte ukrainienne.

• Juste après l'invasion à grande échelle, l'exécutif national du syndicat des pompiers (FBU) a adopté une position similaire à celle de STW, et le FBU a été l'un des deux seuls syndicats à s'opposer à la motion du congrès du TUC de 2023. Cependant, sa conférence n'a jamais discuté de l'Ukraine. Cette année, une résolution a été présentée pour la première fois, incluant l'opposition à la guerre de la Russie et le soutien à l'autodétermination de l'Ukraine, la solidarité concrète avec les pompiers ukrainiens et l'affiliation à l'USC. Malheureusement, elle a été retirée, mais sa présentation a constitué un pas en avant.

• Une motion de solidarité avec l'Ukraine a également été présentée à la réunion des délégués du Syndicat national des journalistes, mais elle n'a pas été adoptée.

S'organiser pour la solidarité

Au moment où Chartist était mis sous presse, d'autres conférences syndicales étaient prévues, notamment celles des trois grands syndicats UNISON, Unite (4) et GMB (5). La conférence politique biennale du syndicat général Unite (7-11 juillet) prévoit une motion visant à activer les liens et la solidarité concrète avec les travailleurs et les syndicats ukrainiens, qui avait été approuvée lors de la dernière conférence en 2023, mais qui n'avait pas été mise en œuvre.

Juste avant le début de la saison des conférences syndicales au Royaume-Uni, le Conseil exécutif central du syndicat général GMB a également accepté d'affilier l'USC, devenant ainsi le sixième syndicat national britannique à le faire, après UNISON, PCS, ASLEF, UCU et NUM.

Ce qui s'est passé au sein du FBU est instructif : si le retrait de la résolution est décevant, il est significatif qu'elle ait été présentée à la suite d'un travail de solidarité croissant au sein du syndicat, construit autour des appels financiers de l'USC en faveur des pompiers et des secouristes ukrainiens, et qu'une région du FBU, les West Midlands, ait récemment adhéré à la campagne. Dans d'autres syndicats également, la période récente a renforcé les liens et la solidarité concrète avec le mouvement syndical ukrainien. On est bien placés pour continuer à construire dans les mois à venir.

Dans plusieurs cas, notamment au sein du NEU (7), les partisans de Stop the War ont tout fait pour éviter, voire empêcher, que les conférences syndicales discutent de l'Ukraine. En plus, STW et ses partisans ont généralement omis de rendre compte des décisions syndicales qui leur étaient défavorables. Lors du congrès de l'UCU, il est apparu que ses partisans affirmaient avoir gagné lors du congrès de 2024, alors qu'ils avaient en fait perdu !

En revanche, la campagne Ukraine Solidarity a encouragé un débat aussi large que possible et une prise de décision démocratique, par principe et parce qu'elle sait que cela profite généralement à notre camp. Nous nous sommes efforcés de rendre publiques avec précision les discussions et les décisions des syndicats dans l'ensemble du mouvement syndical et au-delà.

Notes rédigées par le RESU-Belgique:

(1) Avec 1,3 million de membres, UNISON est la plus grande fédération syndicale britannique, elle organise principalement des travailleurs des services publics.

(2) La "Stop de war coalition" (STW) a été formée en 2001 pour combattre une éventuelle participation britannique à la guerre en Afganistan. Elle a ensuite organisé de nombreuses campagnes concernant l'Irak, la Libye et d'autres conflits. Cette coalition défend une idéologie campiste. Elle est opposée aux guerres menées par les Etats-Unis et les pays occidentaux et refuse de prendre le parti de peuples qui combattent d'autres puissances impérialistes. En Syrie, elle considérait la dictature de la famille Assad comme un régime s'opposant à l'impérialisme. Elle refuse tout soutien à l'Ukraine en affirmant que la guerre massive a été provoquée par l'agressivité de l'OTAN à l'égard de la Russie.

(3) PCS est une fédération syndicale de fonctionnaires qui organise près de 190.000 membres.

(4) L'UCU regroupe des travailleurs de l'enseignement supérieur. Il compte environ 120.000 membres.

(5) Avec 1,2 million de membres, UNITE regroupe principalement des travailleurs du secteur privé.

(6) GMB est une fédération syndicale qui regroupe principalement des travailleurs de l'industrie. Avec 580.000 membres, c'est la troisième fédération syndicale la plus importante.

(7) La NEU regroupe des travailleurs de l'enseignement primaire et secondaire. Il regroupe environ 450.000 membres.

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